Les guerriers Germains

Selon César, les Germains sont des guerriers plus redoutables que les Gaulois parce qu'ils sont éloignés du confort et des plaisirs de la civilisation romaine. La guerre est leur première préoccupation et influe sur toute l'organisation socio-économique de la tribu. L'homme n'exerce en général que cette seule activité, car à ses yeux, c'est paresse et lâcheté que d'acquérir par sa sueur ce qu'il peut obtenir par son sang. Aussi, le reste du temps s'emploie-t-il à ne rien faire. L'entretien de la maison et des champs est laissé aux plus faibles de la famille, femmes et vieillards. Les épouses accompagnent d'ordinaire les hommes à la guerre, et pendant le combat les soutiennent de leurs cris et de leurs soins. L'énergie combative des femmes n'est pas en reste, et on les a vues arrêter la retraite de leurs maris et attaquer l'assaillant du haut de leurs chariots.
C'est en armes que se règlent toutes les affaires publiques et privées. Les Germains choisissent leurs rois d'après leur noblesse et les chefs d'après leur courage. Ces derniers regroupent autour de leur personne des compagnons qu'ils rétribuent en chevaux, armes et festins. Le chef montre l'exemple, et ses compagnons le suivent en toutes circonstances, même dans la mort. C'est un déshonneur de revenir d'un combat ou le chef a péri. Celui-ci se distingue par des vêtements ajustés au corps, tandis que ses hommes vont le plus souvent nus, couverts d'une simple peau de bête, ou d'une saie agrafée sur l'épaule par une fibule ou une épine.
Il n'y a aucune ostentation dans leurs équipements. À la guerre très peu portent des cuirasses ou des casques, à peine un bonnet de cuir pour certains. Leur apparence suffit en effet à intimider n'importe quel adversaire. D'une imposante stature, les yeux souvent d'un bleu insoutenable, les Germains attachent leur cheveux en chignon sur le côté de la tête, ou les hérissent au sommet du crâne pour se grandir et se donner un aspect plus farouche encore. Dans la tribu des Chattes, les jeunes guerriers se laissent pousser barbe et cheveux jusqu'à ce qu'ils aient tué un ennemi. Les plus vieux se font un honneur d'apparaître en première ligne et d'engager le combat.
 
La force des Germains réside dans leur infanterie. Elle marche généralement au combat en formation de coin, derrière des enseignes à représentation animale. La cavalerie est également utilisée, et chez certains peuples, comme les Tenctères, elle jouit d'une grande réputation. Les Germains emploient également des corps mixtes. Aux cavaliers sont adjoints de jeunes fantassins choisis pour leur rapidité et leur robustesse, qui courent à côté des montures, agrippés aux crinières. Fantassins et cavaliers portent un bouclier rehaussé de couleurs, et la framée : sorte de petite lance au fer court et étroit qui peut aussi s'utiliser comme arme de jet. Les combattants à pieds emportent aussi des javelots, souvent de bois et durcis au feu, qu'ils lancent à de très grandes distances. Rares sont ceux qui emploient le glaive ou la lance, si ce n'est les premières lignes chérusques qui sont armées d'une longue pique de plusieurs mètres, qui les aide à atteindre à distance un ennemi embourbé dans les marais. Avant d'engager le combat, pour enflammer leur courage et effrayer l'ennemi, les Germains entonnent le barritus, cri de guerre dont le son rauque s'apparente au barrissement de l'éléphant. Pour lui donner le maximum de puissance, le bouclier est placé devant la bouche en porte voix. C'est le comble du déshonneur que d'abandonner son bouclier sur le champ de bataille. Ceux qui sont frappés de cette infamie mettent généralement fin à leur jour. Les traîtres et les transfuges sont quant à eux pendus, et les lâches sont noyés sous des claies dans la boue des marécages.
Par Francois Gilbert